Ethan resta ébahi. De toute son existence démonique, c'était la première fois qu'il voyait pareille chose se produire.
Mais revenons en arrière.
Cela faisait un temps déjà que toutes les créatures du monde astral, bonnes ou mauvaises - ici encore, question de point de vue -, avaient été quasiment invoquées en ce lieu, suivant l'énergie dégagée par une onde de choc qui avait fait s'ébranler tout le monde des immortels, réveillant les plus paresseux d'une torpeur millénaire... Ethan, décidant que c'était son instinct qui l'avait guidé pour se donner bonne conscience, avait suivi le mouvement et avait commencé à marcher sur la récente "déflagration", restant tout de même sur le qui-vive. Le démon n'aimait pas ce qu'il ne pouvait contrôler. Une invasion de Voyageurs ? Non, Ethan n'aurait pas été si inquiet. Les anges faisant encore montre de leur extraordinaire stupidité ?
Possible, ricana Ethan, ces arriérés mentaux se douchant à l'eau bénite ont peut-être déclenché une fin du monde ?

Ethan était donc arrivé à l'endroit de ses convoitises. Et devant lui s'écoulait lentement vers le bas une... une quoi, d'ailleurs ? Ethan se pencha et n'osa en croire ses yeux. Un grenier. Un grenier... - Ethan se lécha les babines - ... humain. Le démon comprit que cette découverte ne demandait qu'à livrer ses derniers secrets. Si une brèche s'était ouverte entre les deux mondes... Ethan sourit, se nourrissant de chimères qui maintenant, il le savait, pouvaient se réaliser. L'âge d'or des démons arpentant la Terre et totalement hors du contrôle des anges. Une nouvelle ère qui deviendrait éternelle sous le joug des immortels nés des flammes et du néant, un règne d'une main de fer sur ces humains stupides et aveugles.
Mon vieux, pour une fois que c'est toi qui est surpris et non l'inverse... branle-bas de combat !
Et sans une seule hésitation, ne se souciant pas d'un quelconque danger, Ethan sauta dans la brèche.

Dès son entrée dans la maison au toit défoncé, Ethan sentit qu'une chose ne tournait pas rond. Il se sentait lourd... Non, entravé. Prisonnier d'une force inconnue, et l'inconnu apeurait le démon qui commençait à douter des bienfaits de cette brèche. D'ordinaire, rien n'était plus simple pour lui et ses confrères de revenir dans le monde astral comme bon leur semblait. Plus simple encore qu'un jeu d'enfant, tout ce qu'il y avait de plus banal. Pourtant... Il se sentait "attaché", devant accepter la présence d'un corps intrus, comme si un cathéter drainait sa capacité à retourner dans son monde.

Dès lors, Ethan commença de s'inquiéter.

HRP:

Lyra ouvre lentement les yeux. Etendue sur son lit, elle fixe le toit de sa chambre, juste au-dessus de son lit. Les étoiles phosphorescentes semblent la narguer avec leur contour bizarrement flou. Elle porte une main à son oreille. La musique paraît légèrement atténuée... Elle comprend soudainement. Elle qui s'était allongée sur son lit juste pour se détendre et réfléchir, la voilà qui s'est endormie et, de toute évidence, est de retour dans le monde astral. Comme elle sait à présent comment réagir dans de telles situations, Lyra se redresse prudemment. Son image se dédouble et elle se sépare doucement de son corps, petit fantôme aux couleurs presque effacées. Elle glisse l'iPod dans la poche de son pull «réel» et s'envole vers le toit, technique apprise en autodidacte. Silencieusement, elle passe à travers le plafond de sa chambre pour arriver dans le grenier qui parait maintenant sinistre. Comme d'habitude. Lyra flotte vers un coffre, soulève le couvercle et s'empare de la boîte à musique qu'elle fourre dans sa poche. Maintenant, elle ne part jamais sans dans le néan, ce serait vraiment trop stupide. Prise d'une soudaine curiosité, Lyra s'approche souplement du velux du grenier, ouvert, et suit les courants d'air pour s'approcher de l'ouverture. Elle hésite et prend le temps d'examiner l'état des lieux, à juste titre... L'air a une drôle de couleur, pas cette consistance brillante habituelle, comme les reflets multicolores dans les flaques d'essence. Intriguée, Lyra se glisse par la fenêtre et la referme, cachant la clef dans une poche intérieure. Ce serait...suicidaire de partir sans, maintenant que le Corbeau est dans les parages et qu'il la cherche toujours.
Par réflexe, Lyra flotte vers la maison de Barnabas, pour vérifier si il est toujours là. Son cousin s'active dans le magasin... Et tout va bien, pas de démon en vue pour le moment.

«Ca me paraît bien calme,» songe Lyra en arquant un sourcil.

Elle profite de l'occasion pour se rendre chez Alex, en passant chez Alyssa, pour voir si sa soeur est réveillée ou en proie en ses démons. Elle ne voit rien et se rend directement chez les Jordan, filant discrètement en empruntant des raccourcis connus d'elle seule. Pendant tout son parcours, elle ne croise personne... Sauf que la plupart du temps, elle aurait dû se faire déjà attaquer...
La plupart du temps.

«Tout va bien, Lyra, respire...»

Elle se presse et regarde tout le temps derrière elle, dans un état proche de l'hystérie. Ce n'est pas normal que le monde astral soit si silencieux. Pourvu qu'il ne soit rien arrivé à personne... Elle ne trouve toujours pas ce qui se passe, et arrive bientôt devant chez Alex, toujours aussi inquiète. Elle parcourut la rue du regard, attentive, et remarque tout de suite ce qui cloche. Ce qui l'a réveillée, c'est la terre qui tremblait. Et ce qui ne va pas, c'est cet atmosphère, lourde, pesante, qui semble l'écraser alors que sous sa forme astrale, Lyra ne pèse rien. Elle suit le regard des passants et reconnait la maison de Maeva Renoir... Une médium. Tiens donc. Coïncidence, ou fait réel ?
Il y a quelque chose qui cloche, et ce quelque chose a à voir avec le monde astral, c'est sûr maintenant.
L'obscurité est totale, Lyra le comprend lorsqu'Alex allume une lampe de poche. Elle le voit remuer les lèvres mais n'entend pas ce qu'il dit et envoie un coup de poing dans les airs, pour rien, de frustration. Venir jusqu'ici dans le monde réel aurait été bien plus intelligent de sa part. Et elle n'aurait tout simplement pas s'endormir au mauvais moment...
Lyra soupire, un petit nuage de buée brillante sort de sa bouche. Elle se contente d'observer la maison de Maeva, impuissante, et attend qu'il se passe quelque chose.

Je ne me souviens de rien. De rien sinon que j'ai vu un effroyable présage dans la glace de mon miroir. Puis, maintenant, je suis devant cette maison.

Je me secoue la tête, et creuse ma cervelle. Rien. Je n'ai aucun souvenir de ce qui s'est produit depuis les quinze dernières minutes - sinon plus. Je suis tout simplement apparut devant cette maison. Une brise vient me donner un frisson désagréable à la nuque, et le bout de mes doigts me piquent. Je réalise que j'ai mon sac à dos et mon lourd manteau sur le dos... Qu'importe ce qui s'est produit, je sens que je suis poussé par quelque chose de bien plus grand et fort que moi dans ces lieux. Après un bref coup-d'oeil, je réalise qu'il s'agit de la maison de Maeva Renoir. La connais-je? Que de rumeurs. Et je me dis qu'il s'agit d'un bon moment pour explorer son antre, apparemment. J'agrippe fermement la ganse de mon sac et monte les marches de l'entrée pour entrer dans la place.

Un fond de moi me dit que mon grand-père me pousse à cet endroit. Un autre me dit qu'il s'agit de bien pires desseins, et que le Destin me pousse à agir en ces lieux. Sans froid aux yeux, ni crainte au ventre, j'entre dans la place avec la plus silencieuse des bottes. Aperçu de l'endroit dense et noir, je place une mèche derrière mon oreille et toussote dans le creux de mon coude la poussière garnissant le tapis. Puis je m'avance à l'aveuglette, restant tapit dans le mutisme et l'ombre.

Une lumière attire mon attention non loin. Une lampe de poche. Je m'y approche en plissant des yeux... Alex. Je reconnais sa voix avant son visage. Que fait-il en ces lieux?! Je m'empresse de contrôler la nervosité, soudainement. Sommes-nous de l'autre côté? Est-il en danger? Sans prévenir ou avertir ma présence, je pose une main sur son épaule en surgissant de nul part derrière lui dans ce qui semble le slaon. Lorsqu'il se retourne, je lui fais signe de rester silencieux en posant un doigt sur mes lèvres. Et je pointe du regard la salle à manger, plus loin devant nous; des grincements se font entendre, comme des bruits de pas...

Si je sais ce qui se passe? Je le fixe à l'oeil, jusqu'au plus profond de sa cornée. J'espère vainement trouver une réponse. Tout ce que je lui donne est un haussement d'épaule et un hochement de tête négatif, plus un murmure fin:

_Non. J'espérais que tu me répondes. Tu sembles connaître Maeva bien plus que moi...

Ce qui est vrai. J'ignore même pourquoi j'ai mis les pieds dans cette maison. Parce qu'un pressentiment m'avait dit de faire. Mais encore...

Un frisson brûlant m'égratigne la nuque. Je me retourne vivement en portant ma boule à neige au devant de moi. C'est un sursaut, mais point celui qui nous saisit lorsqu'on sent la présence du vilain. Plutôt celui qui nous prend à la gorge quand quelque chose de bien et inattendu arrive. Quelque chose de bien dans un contexte si sombre...

Je baisse le regard. Il y a Lyra sur le sol. Immédiatement je bondis sur elle pour la saisir doucement et la mettre sur pied. Toujours, je parle en chuchotement.

_Lyra... Lyra, est-ce que ça va?

Lui demander ce qu'elle faisait là serait futile. Elle ne le sait probablement pas. Et cette situation commence à me tenailler. Alez. Ensuite Lyra. Quel autre innocent se verra dans cette situation? Quel autre monstre, surtout...

Je me retire un moment de côté et laisse les deux adolescents ensembles. Je ferme les yeux et transmet un message dans l'air depuis mon énergie. Il est adressé à Maeva, j'espère qu'elle l'interceptera avant qu'un démon quelconque ne le fasse.

_Pourquoi? Pourquoi nous, ici? Dites-nous: que se passe-t-il?

Spoiler:

J'ai à peine le temps de me remettre de la chute et de me repérer qu'on me relève d'un geste sûr, et je me contente alors d'essayer de me lever, je tends une main fatiguée vers Barnabas, en souriant pour ne pas l'inquiéter. Il ne manquerait plus qu'ils me prennent pour un monstre...

- Lyra ... Lyra est-ce que ça va ?

j'inspire profondément avant de sourire.

- Ca va, j'ai mal partout mais ça va, je réponds d'une voix peu assurée.

Je lève des yeux inquiets vers Alex qui me regarde bizarrement, je baisse tristement le regard; j'ai peur qu'il croie vraiment que je suis un monstre ou un démon maquillé. Si c'est ça...
Je sursaute légèrement quand Alex m'attire contre lui mais je finis par me détendre.

- Lyra ... c'est Alex ! Tu vas bien ? Répond-moi ! comment es-tu arrivée ici ?

Je fais un sourire parfaitement idiot.

- J'ai traversé un miroir, Al, dis-je d'une voix absente. Un miroir, comme dans les histoires...

Les paupières close, je tente de retracer quelque présence qui soit. Rien. Le vide. Je serre les dents. C'est impossible. Dans la maison de celle que l'on dit médium de la ville, il faut bien qu'il y ait quelque chose à nous donner signe... Je ne perçois rien, pourtant. Puis, des murmures intelligibles me proviennent de loin, très loin, comme un échos. Et s'intensifient. Une douleur stridente me scie le crâne.

J'ouvre les yeux. Je n'ai le temps de réagir que je vois une table voler vers moi et m'assommer de plein fouet. Je suis projeté contre le mur où je tombe, à son pied, en prenant ma tête à deux mains. Je souffre comme si mille tintamarres avaient pris possession de ma cervelle. Je crispe mon visage et tremble de tous mes membres. Dans mes tympans, on hurle, psalmodie et on arrache des cris odieux. Et tout cesse. D'un coup.

À bout de souffle, je reprends mes esprits et fixe le sol devant moi. Je me relève avec difficulté et m'appui contre le mur. Qu'était-ce?! Je regarde autour de moi avec précaution. Rien. Je ne vois rien. Le porche est vide, la cuisine semble déserte aussi. Je lève le menton. J'entends des pas, le murmures des planches de bois qui grincent, au deuxième étage. Je fixe le second étage que je devine très mal au travers des colonnes anciennes et magnifiques.

Je n'ose bouger. Je regarde Alex et Lyra. Ils n'ont rien. La personne que je soupçonne plutôt à être en mauvaise posture est Maeva.

Je ne regarde plus Alex, pas le moment, et quand la table tombe vers Barnabas, je cours vers mon cousin. Je m'accroupis auprès de lui et le regarde, inquiète.

- Barn', ça va ? T'as rien de cassé ? Qu'est ce qui se passe ?

J'ai plein d'autres questions à poser, mais je me retiens, je me tourne vers Alex finalement, les pensées les plus bizarres viennent dans ma tête. Une table ça ne bouge pas tout seul... On se croirait dans un film d'horreur. J'ai peur, je l'avoue...

- Vite !! Il faut sortir d'ici au plus vite !!

Je me lève sans attendre de réponse de Barnabas et rejoins Alex pour l'aider à défoncer la porte.

- C'est bloqué ! je hurle.

Je me retourne vers Lyra et Alex. Ils accourent vers la sortie, en fait tentent de franchir la porte qui ne veut s'ouvrir. Je fronce les sourcils et serre les poings. Tout devient de plus en plus inquiétant et anormal. Je tente de me rappeler, alors que j'étais dans la cuisine, si j'avais vu une porte menant à une cours arrière. Un porche. Oui, je crois qu'il y avait un porche.

_Alex, Lyra, tentez de sortir par la porte arrière. Il semblerait que... quelque chose bloque celle-ci.

Je fais regard minutieux et sévère à la porte. Je tente de ressentir une présence ou quelque chose qui soit agressif. Je ne perçois rien. Je pose la main sur la rampe de l'escalier.

_Quittez cet endroit immédiatement. Mettez vous en lieu sûre. Cet endroit n'est plus sécuritaire du tout. Je crois qu'il y a quelque chose à l'étage, je vais aller y jeter un œil.

Et j'enjambe les escaliers rapidement pour me retrouver au second. Plus vite nous pourrons nous débarrasser de cette entité, plus vite ce jeunes seront en sécurité.

Je monte au second étage en espérant que les jeunes s'en sortent au premier. Je dois vite agir avant que pire ne se produise... c'est-à-dire rapidement.

J'escalade rapidement les escaliers et me retrouve devant une scène terrifiante. Une lueur verdâtre et obscure enduit mes iris et me fait lever le menton. Je vois un funeste orage juste sous mon nez. Et je n'ai pas besoin de me poser tant de questions; je devine qu'il s'agit d'une porte. Quel malheur vient de s'abattre sur notre quartier?

Un rire derrière moi. Je me retourne rapidement et vois Ethan de son sourire malicieux et maléfique qui me toise d'un air de défi.

_Toi...

Je dégaine ma boule à neige et immédiatement je le vois s'enfuir parmi ses frères de démons, vers les cieux. Les nuages qui sont maintenant plafond du logement sont noirs et touffus.

_Maeva... Qu'est-ce que tu as fait?

Je demande à moi-même dans le vide. Comment arrêter cette chose? Impossible à savoir. Mes simples poupées sont bien trop minimes pour un tel déluge. Puis je m'inquiète pour les jeunes à l'étage du bas:

_Lyra? Alex?

Je leur crie afin de seulement savoir s'ils sont toujours en état de me répondre.